Le cinéma a souvent cédé à l’attrait du désert et de la route. Pour son second long métrage après le remarquable Dans ma tête un rond-point, Hassen Ferhani substitue à la tentation d’une dérive façon road movie la nécessité qu’on a forcément d’y faire halte. Désignant le temps d’un film un point qui lui sert d’adresse et de titre sur la carte du Sud algérien, il prend ses distances avec l’espace clos enfoncé dans la nuit de son précédent documentaire pour laisser passer depuis le 143 rue du désert la brûlure d’un soleil de plomb. Ici, au lieu d’un rond-point, une bicoque se change en carrefour, celle où Malika, une femme seule, d’âge avancé, sert omelettes, boîtes de thon, pain, café et thé aux voyageurs et routards qui passent et aux camionneurs qui plus régulièrement s’arrêtent. Du bout de la petite table de son royaume de 20m2, Malika ouvre sa maison à ceux qui font halte comme un caillou offert aux caprices des vents et des paroles, à la rumeur d’un monde lointain que les conversations amplifient. Dans la buvette, chacun vient jouer sa scène, le temps d’un verre de thé ou d’un repas, trouvant en Malika une interlocutrice attentive et lucide. Le portrait de cette femme seule et forte dont la vie se peuple de la présence des autres dessine une autre intersection entre le réel et sa métaphore : celle d’un pays au bord de la route.
Récompensé par le Prix du jury jeune, le Prix du Public et une Montgolfière d’argent au Festival des 3 Continents, 143 rue du désert aura été depuis sa pittoresque adresse le point de ralliement du palmarès de notre 41ème édition. JB