Le mariage de Duyen avec Hai lui assure d’être admis désormais dans la sphère des hommes, celle d’une virilité bien pesée que ses congénères affichent comme une convention sociale. Hai se prépare à faire de lui l’homme qu’il faut être et sous le regard complice et vigilant des femmes qui l’entourent, l’amoureuse doit devenir une femme. Mais ici le mariage ne fige pas le cadre d’un contrat, il fragilise les repères des personnages dans leur environnement. La réussite de ce second long-métrage de fiction de Chuyen Bui Thac (après Vivre dans la peur, 2005) tient à la description qu’il propose par le détail d’une situation a priori bien ordinaire sans concéder à un naturalisme de commodité. Les personnages ne sont plus des types sur lesquels on viendrait paresseusement plaquer quelques idées en forme de portrait social mais bien un dessin mobile, flottant, que l’on s’applique à reprendre de chacun des personnages. Par delà les tabous, les troubles et les hésitations, la preuve de leur existence en quelque sorte.
Jérôme Baron