L’œuvre de Qiu Jiongjiong, également peintre reconnu, semble tout entière sous-tendue par une inflexible détermination documentaire. Avant A New Old Play, sa première fiction, six autres films témoignent d’un art du portrait qui déplie entre intimité du sujet et histoire de la Chine le récit d’individus dévorés par des contextes qui les dépassent. L’ambition folle de A New Old Play est de fabriquer (et le mot se concrétise sur l’écran de bien des façons) une forme de contre-récit à l’histoire officielle. Sur un demi-siècle, le film déploie comme un rouleau sa vision détaillée et panoramique, trait d’union entre la tradition de l’Opéra du Sichuan (le grand-père du cinéaste, acteur, l’y a initié très jeune), la peinture, le théâtre d’ombres, et un récit familial et collectif. Comme l’acteur-narrateur fait revivre ses souvenirs et négocie sa réincarnation à la porte des Enfers, ce sont les artifices d’un tournage en studio qui échafaudent une inestimable résistance à l’oubli. JB
Première française