Argent amer
(Ku Qian)

Récompensé pour le meilleur scénario dans la section Orizzonti lors de la dernière Mostra de Venise, Bitter Money est le dixième long-métrage de Wang Bing en treize ans. Il n’est pas difficile de saisir l’inusable persévérance du plus grand documentariste de la Chine contemporaine au regard des évolutions de son pays. Pour peu qu’il existe des gens invisibles, violentés, en situation de survie ou en quête de meilleures conditions de vie (le plus souvent incapables de les concrétiser), il y aura toujours des raisons de filmer, d’être présent. De nombreux hommes et femmes circulent ainsi titre “amer”, où depuis la province de Yunnan, au sud-ouest de la Chine, nous entrons dans la ville de Huzhou, à l’Est. Devenu un aimant pour les immigrants en quête de travail dans l’industrie textile, nous y arrivons en suivant une jeune fille de quinze ans originaire des campagnes du Yunann, épicentre de tous les derniers films du cinéaste. Comme elle, Wang Bing est avalé par le flux de la main-d’œuvre locale en découvrant un labyrinthe de galeries de conditions de vies précaires, d’exploitation, de situations extrêmes. À travers un fin montage qui ne révele pas des fils conducteurs artificiels, une accumulation bruyante de personnages et de situations nous confronte à une realité crue – imbibée en noir comme l’écran à la fin de la séance. AR