D’étranges et belles visions, de badminton et de dynamite, nous accueillent dans ce premier long métrage entêté, entêtant comme un vieux tube des années 80. Comme une vieille chanson, trop chantée, par exemple « I just called to say I love you » de Stevie Wonder, qu’à la surprise générale un vieux dentiste à lunettes noires (d’aveugle ? de star ?) fredonne soudain, penché au-dessus de son patient, au début du film, après un tunnel de séquences envoûtantes et ouatées. Le film continue, pas facile de savoir de quoi il s’agit, mais les images d’Edwin ne vous laissent pas tranquille, et puis ça revient, encore et encore : « I just called to say I love you ». Jusque sur des images d’émeutes sur une table de montage. Malgré son titre bizarre et ses envolées, le film d’Edwin évoque le sort douloureux de la minorité chinoise en Indonésie. En douceur, par la grâce fugitive de scènes à demi rêvées, de flash-back, de déambulations insoumises à une narration, plutôt lancées à la volée, au gré du vent. L’audace et la liberté formelle que s’autorise Edwin ne semblent pas connaître de limites et pourtant, il trace un portrait étouffant de son pays.
Jean-Philippe Tessé