Lionel Rogosin, éminente figure du cinéma américain engagé des années 50 et 60, part en Afrique du Sud au prétexte d’y tourner un film documentaire commercial sur la musique noire. Il signe à la place un film unique, documentant clandestinement la vie dans le township (ici les acteurs jouent et inventent à la fois leur rôle), Come Back, Africa découvre sa forme dans un rapport éthique renouvelé au réel, s’inscrit à la fois comme un film historique et geste politique d’une grande force. Le récit, simple et didactique, évoque l’itinéraire d’un homme d’origine zouloue qui se rend à la ville pour y trouver un travail et subvenir aux besoins de sa famille. Il se retrouve à chaque fois confronté à la ségrégation de ses patrons blancs. Vraies paroles, vraies colères, vraies images et vrais chants (première apparition de l’immense Myriam Makeba, que Rogosin va révéler à l’Amérique), le cinéaste offre un prolongement inédit au cinéma de Flaherty. C’est Johannesburg 1959 qu’on voit, ni plus ni moins.
J.B. / M.M.