Un paquebot chargé de touristes croisant dans les eaux de la Méditerranée, la famille Martin (comme une tribu sédentaire) dans sa station-service familiale, et l’Europe en question, celle qui obsède les cinémas de Godard depuis la chute du mur de Berlin. Cette Europe en train de perdre sa Grèce, théorème perdu et antique raison qui avaient vu naître le même jour un soleil et sa nuit : la démocratie et la tragédie. L’odyssée de Film socialisme part à la dérive d’un rêve impérieux mais de plus en plus lointain énoncé par le cinéaste : ne pas mourir avant d’avoir revu l’Europe heureuse ; c’est-à-dire unie : « il faut savoir dire « nous » pour pouvoir dire « je« ». Sur la mer troublée de notre présent, méditation ouverte mais mélancolique, Film socialisme se donne une image qui nous ressemble, peinture tapageuse et criarde faite de low et high definition des téléphones portables et des petites caméras, écrit comme parlé, peuplé de morts éternels et de vivants qui passent, il est à la recherche non plus de formules savantes mais d’un poème sans concession. JB