C’est l’histoire d’Ana, Verónica, Marta et Toro, quatre personnes solitaires qui vivent dans le silence et la routine du Sud. Ils font la cueillette pour manger, marchent sur la plage, prennent le ferry ou se retrouvent sans sentir le besoin se parler. D’une certaine manière, ils essayent de s’évader sans faire de bruit, de manière furtive et extrême. Ils recherchent l’amour, le sexe, l’affection inexistante d’une famille ainsi qu’un espace et une parole qui leur soit propre. Ils cherchent à distancer la solitude qui les habite intimement, mais au bout du compte, s’ils le font c’est simplement pour mieux se retrouver
Ce premier long-métrage de fiction du jeune réalisateur chilien José Luis Torres Leiva semble prolonger avec obstination l’engagement de ces précédents films, Obreras saliendo de la fabrica, remarquable court-métrage présenté au festival des 3 Continents en 2006, Ningun lugar en Niguna parte, El tiempo que se queda, deux documentaires. Il y affirme avec une fermeté toute personnelle que le cinéma conserve le pouvoir de nous transporter, au-delà des apparences et des formes dans lesquelles les êtres et les choses semblent retenues. En rendant visibles les marques de son écriture (montage, photographie, son), il souligne aussi la nature particulière du prélèvement que le cinéma opère de la réalité renouant ainsi avec une qualité toute primitive du geste cinématographique. Alors, cette terre du sud du Chili, ce bout du monde lointain même pour ceux qui l’habitent, nous saisit de toute son énigmatique et hostile beauté.
Jérôme Baron
