À la fin de l’ère Edo, un samouraï, Sanjuro (Toshirô Mifune), arrive dans un village écartelé entre deux bandes rivales, menées d’un côté par le bouilleur de saké, de l’autre par le courtier en soie. Les deux bandes veulent s’adjoindre les services de Sanjuro.
Alors que le modèle féodal touche à sa fin, que le bushido – code d’honneur des guerriers – n’est plus respecté, un samouraï désoeuvré erre et vend ses services de garde du corps au plus offrant. Ce ronin, personnage solitaire, est atypique : privilégiant la négociation et la ruse à l’action, il est, pour Charles Tesson, « le premier héros de films de sabre cynique et opportuniste (une révolution au Japon dans l’histoire du genre), plutôt occupé à faire commerce de son talent au lieu d’en faire usage. ». Dans ce film, le plus grand succès du cinéaste au Japon, Kurosawa dresse le portrait d’un homme, maître dans son art, astucieux, manipulateur (il accélère la destruction mutuelle des deux camps), altruiste (mais de façon sélective), et infiniment cynique. Le Garde du corps inspirera Sergio Leone pour son mythique Pour une poignée de dollars qui en est le remake. Kurosawa invente sans le savoir un des personnages archétypes du western italien, le professionnel efficace, souvent dénué de scrupules. Alors que Leone tournera Et pour quelques dollars de plus, Kurosawa réalise en 1962 une suite à Yojimbo, simplement intitulé Sanjuro.