Kazuhiro Soda revient au festival des 3 Continents, où ses films d’observation Campaign et le dyptique Théâtre ont été présentés en compétition. Son nouvel opus, Kaki Kouba, nous introduit dans la vie quotidienne des exploitations familiales d’ostréiculture de la petite ville côtière d’Ushimado, au Sud-Ouest du Japon. Watanabe est un membre récent de cette communauté, ayant déplacé sa famille et sa petite entreprise, la Hirano Oyster Factory, très loin de la zone dévastée en 2011 par le tsunami. À l’approche de la haute saison de la pêche aux huîtres, Watanabe et ses confrères sont confrontés à un problème majeur : le manque critique de main d’œuvre, causé par l’exode rural, nécessite de recourir à des renforts venus de Chine, geste peu naturel pour ces Japonais très méfiants vis-à-vis de leurs voisins continentaux. Le travail de Soda ne cesse de nous interpeller car lui-même se laisse surprendre, partageant avec nous une méconnaissance initiale d’un milieu qu’il intègre sans préparation, à l’écoute des règles qui l’organisent et ouvert à l’imprévu. Armé tout de même d’atouts précieux, notamment d’un sens de l’humour – doublé d’un sens de l’absurde – qui imprègne le film sur sa durée, Soda poursuit d’un film à l’autre une étude du Japon contemporain dont la résonance politique nous apparaît toujours plus impérieuse.
A.G.