Chouga creusait son sillon entre les lignes d’Anna Karenine. Student revisite Crime et Châtiment (1866) : Omirbaev revendique pour son cinéma une noble origine littéraire, où la critique sociale est indissociable d’une étude des tréfonds de l’âme humaine. Décor des errements d’un étudiant en philosophie tenté de se placer au-dessus des lois et de la morale, les rues de la capitale kazakh Almaty livrent à chaque carrefour la vérité d’un ordre qui s’exhibe dans de ronflantes architectures. Une guerre se joue à l’intérieur d’un solitaire catatonique (très éloigné en cela de Raskolnikov), le poussant toujours un peu plus loin vers la déraison. Le matérialisme triomphant imposera à tous sa logique écrasante, pulsionnelle. Professeur de maths appliquées à l’école d’arts d’Almaty, Omirbaev, qui incarne dans la première scène un réalisateur de publicité, pose sur la jeunesse de son pays un regard distant mais ému. Il lui lègue au passage un point de départ, Dostoïevski, et un point d’arrivée, Robert Bresson. JB