Comme Ping Ping, 19 ans, veut émigrer au Japon, elle multiplie les petits boulots, entre plonge dans un restaurant, inséminatrice de porcs dans une ferme et même mère porteuse pour un trafic de bébés menés d’une main de fer par sa tante. Tiré d’un fait-divers et tourné rapidement caméra à l’épaule, The Tiger Factory saisit avec une urgence quasi-documentaire l’environnement de la jeune femme, son réseau de dépendances, en même temps qu’il livre un portrait intime. « Les personnages de tous mes films sont frappés d’une sorte de paralysie, confie le cinéaste, qu’il s’agisse d’une peur, d’un regret ou d’un faux espoir de vie meilleur ailleurs ». La mise en scène au présent et au plus près de l’héroïne secoue justement son mutisme, sa passivité. C’est à l’éveil d’une conscience sociale et maternelle que nous assistons. Car l’enjeu pour l’« exploitée » a beau être son désir de fuir la Malaisie et ses maux sociaux, nous spectateurs souhaitons surtout la voir sortir de la mélancolie qui est en passe de la mener droit au cynisme des « exploiteurs ». CG